• Les Malheurs du XVI et XVII ème siècles

    Les XVI ème et XVII ème siècles connaissent des périodes de troubles, lesquels marquent aussi les confins du Verdunois.
    Il y a d'abord les guerres de religion. La supplique mentionnée précédemment, dans laquelle, le 25 avril 1588, Jean de Triconville s'adresse au grand-duc Charles de Lorraine pour lui demander de l'aider à lutter contre les protestants, atteste indirectement que la région n'est pas épargnée par les conflits armés opposant catholiques et protestants de 1562 à 1598. Cette requête indique que le seigneur de Bezonvaux n'a plus l'argent nécessaire pour payer des soldats lui permettant de lutter contre les huguenots. En effet, depuis 1584, Guillaume de Schélandre, gouverneur protestant de Jametz (petite place forte dépendant de la principauté de Sedan), rançonne les villages du Verdunois. En février 1586, le duc de Lorraine convoque la noblesse et, à la fin de l'année, envoie des renforts pour arrêter les incursions des réformés. Mais, le cordon de troupes installé entre Mangiennes, Pillon, et Bréhéville est insuffisant et les déprédations continuent. Le 15 avril 1587, du bétail et des chevaux sont à nouveau volés dans les villages de la Woëvre, en particulier à Mogeville et Morgemoulin. Une sortie depuis Verdun est organisée le 24 mai suivant : des soldats en armes parviennent jusqu'au fond de Curemont, sur le territoire d'Ornes. Leur attaque tourne mal et ils sont défaits, laissant des morts sur le terrain et perdant des prisonniers. Le souvenir de ce raid protestant dans la Woëvre s'est conservé à travers le nom d'un lieu-dit situé au sud-est de Bezonvaux, à proximité de l'ancienne ferme de Méraucourt : le ravin des Huguenots. Les troubles vont encore continuer pendant deux ans dans la région. Au début de 1588, African d'Haussonville, comte d'Ornes, met sur pied un détachement de trois mille fantassins et huit cents cavaliers en vue de couper Jametz de Sedan. Il est probable que Jean de Triconville participe à cette opération qui échoue et cette année 1588 se passe en assauts infructueux contre la petite place. La ville est prise le 29 décembre, mais il faut attendre le 13 avril 1589 pour que le château tombe à son tour.
    La seconde calamité dans la zone de Bezonvaux est constituée par la Guerre de Trente Ans (1618-1648). Ce grand conflit politique et religieux, qui naît en Bohème et ravage l'Allemagne, gagne l'Alsace et s'étend jusqu'à l'Argonne. La région correspondant à l'actuelle Lorraine est concernée principalement à partir de 1626, la disette s'ajoutant à la guerre et la peste s'abattant en 1636. Devant la menace que constitue l'alliance du duc Charles IV de Lorraine avec Frédéric II de Habsbourg, empereur du Saint-Empire, lequel veut rétablir par la force le catholicisme dans les territoires constituant cet empire, le cardinal de Richelieu et Louis XIII interviennent en 1632 puis l'année suivante : ils font occuper les places fortes du duché de Lorraine et prennent Nancy en 1633. Cette guerre se double d'un conflit avec l'Espagne à compter de 1635, les Lorrains se rangeant aux côtés de ce pays. Les mercenaires incorporés dans l'armée française (Hongrois, Polonais, Croates et Suédois) se livrent alors à des exactions, pillant les églises, incendiant les villages, tuant les habitants. Dans les villes, une sécurité relative règne grâce à la protection des remparts. Des châteaux suffisamment fortifiés offrent également un abri aux populations voisines : celui d'Ornes devient le refuge des villages environnants dont Bezonvaux. Toutefois, la maladie, la sous-alimentation et les mauvaises conditions de vie entraînent une mortalité importante. Dans un relevé des décès des personnes mortes et enterrées à Ornes du 1 janvier au 24 juillet 1636, on trouve 12 originaires de Bezonvaux. En 1637 s'ajoutent les conséquences de la campagne du maréchal de Châtillon dans le Nord-Meusien, avec notamment le siège de Damvillers d'août à octobre. Les années 1636 à 1641 sont très dures : les localités sont en ruines, les champs en jachères, le bétail ainsi que les chevaux ont disparu et les villages sont quelquefois déserts. Forcément, les pertes démographiques dues aux massacres, mais aussi à la peste et à la disette, atteignent jusqu'à 60% des habitants de certaines agglomérations. D'ailleurs, on ne compte plus celles qui disparaissent alors : par exemple, Les Chambrettes à quelques kilomètres au nord-ouest de Bezonvaux et peut-être d'ailleurs un écart de celui-ci, Méraucourt ou Muraucourt. Cette situation est prouvée, entre autres, par l'extrait suivant, montrant aussi qu'a l'administration lorraine s'est substituée l'administration royale : 

    « On voit par l'attestation d'un sieur Gachet, lieutenant d'une compagnie de la garnison de Nancy, envoyé en 1653 pour faire rentrer les deniers du Roi, un exemple de la situation générale. Il constate que s'étant rendu plusieurs fois â la tête de ses fusiliers à Bezonvaux, Beaumont, Soult, Bassaucourt, Mondre aux Quatre-Tours, etc., il n'y a trouvé ni homme, ni femme, ni bestiaux ni autre chose pour pouvoir se faire payer ».

    La région se relève forcément peu à peu de ces épreuves. Pourtant, la situation s'aggravera à nouveau sous l'effet du terrible hiver de 1709 : tous les semis de blé seront gâtés et ne produiront pas ; la misère deviendra à nouveau générale et la mortalité doublera.