• Bezonvaux : La survie dans la mémoire

    Bezonvaux : le lavoir Saint-Gilles reconstitué d'après les devis de 1905 ; l'extérieur vu du côté ouest.

    En 1914, Bezonvaux possède deux lavoirs identiques existant depuis une époque inconnue : le lavoir Saint-Gilles (dédié au patron du village) et le lavoir Maltus. La municipalité avait fait exécuter, en 1905, des travaux à leur profit : le premier a été reconstruit, le second restauré ; tous les deux avaient déjà été réparés en 1849.
    Le lavoir Saint-Gilles se trouve dans la partie occidentale de la localité, approximativement entre l'église et le « château ». Il est alimenté par l'eau du ruisseau dont le niveau, relevé par un barrage, permet de remplir convenablement le grand bac. Sa charpente est encore visible sur une photographie de l'église prise, au printemps 1916, depuis la cour du "château". Ce lavoir succède à une première installation qui ne devait pas être plus qu'une fontaine avec un bassin. Celle-ci n'est d'ailleurs pas supprimée et son emplacement est connu avec certitude puisqu'en 2003 le tuyau en plomb amenant l'eau et une partie du corps de la pompe sont retrouvés au cours de travaux.
    L'autre lavoir, dont il reste quelques vestiges inaccessibles, est implanté à l'est de la Grande Rue. Il est approvisionné en eau par la source Maltus qui se jette ensuite dans le ruisseau. A côté de ce lavoir existe la remise abritant la pompe à incendie et construite en 1849.
    Ces deux lavoirs, couverts et bien abrités, sont utilisés par les ménagères et les lavandières pour laver le linge.

     

    Bezonvaux : La survie dans la mémoire

    Bezonvaux : le lavoir Saint-Gilles reconstitué d'après les devis de 1905 ; vue en plan.

     


  • Le premier est la Croix des Rogations dressée dans la Rue Haute. Les Rogations, qui appartiennent au culte catholique, sont des prières publiques et des processions faites pour attirer sur les champs la bénédiction divine ; elles se déroulent en principe au mois de mai. Cette tradition vivace autrefois n'a pas entièrement disparu de nos jours. A Bezonvaux, à l'occasion de plusieurs fêtes religieuses, en particulier celle des Rogations, des processions partent de l'église et, chaque année jusqu'à la guerre, les habitants vont en priant de l'église à la Croix de la Rue Haute. Le montant vertical de cette croix a été retrouvé en 2002. L'objet tel qu'il a été remonté en 2003, à 300 mètres au nord de son emplacement initial, est composé d'un montant vertical, vestige de la croix d'origine dégagé des ruines, et d'un montant horizontal qui n'est pas d'époque. Son embase a été réalisée avec des pierres récupérées dans les décombres du village.
    Le second calvaire est la Croix Richier : elle se trouvait au nord du village, à l'intersection du chemin des Rousses et de la route Ornes-Damloup. Elle se dressait encore en 1916, quasiment intacte.
    Le troisième est la Croix du Vignot, implantée au sud-ouest de la localité, à un carrefour de chemins dont l'un mène à Verdun et Douaumont, à proximité de la pièce de vignes appelée Le Vignot (toponyme apparaissant encore sur certaines cartes).

     

     

    Les principales constructions de Bezonvaux jusqu'au debut du XX siècle

    Bezonvaux : la Croix Richier photographiée par un officier de la 21.R.D., sans doute dans le second semestre 1916.


  • Le moulin de Bezonvaux est une installation implantée au bord du ruisseau, à 500 mètres en aval de l'agglomération, vers l'Est. Son origine est inconnue.
    Pendant une période indéterminée, il y a certainement deux moulins à Bezonvaux, puisque la formule « les moulins haut et bas » est attestée en 1664. Ces deux installations, servant pour Douaumont, Bezonvaux et Beaumont, sont soit un moulin à eau (le moulin bas) et un moulin à vent (le moulin haut), soit deux moulins à eau : un en amont du ruisseau et un en aval.
    En ce qui concerne ce dernier, le seul sur lequel on dispose d'informations, il existe une obligation pour tous les « bourgeois » et habitants des trois villages d'y faire moudre leurs grains. Bien sûr, cette utilisation s'effectue en acquittant une taxe de mouture s'élevant au 1/25e des grains apportés. Une amende de 5 francs est appliquée pour toute infraction à cette obligation. Par exception, les admodiateurs et les résidents de « La Caution » propriété sise à Bezonvaux et appartenant à l'abbaye de Juvigny, même s'ils doivent faire moudre leur grains dans ces moulins, sont exonérés de cette taxe. Pour fixer le montant des sommes à reverser aux propriétaires des droits attachés à l'installation, dont la communauté de Juvigny qui en percevra un tiers, un arrêté des comptes est établi annuellement et des contrôles sont effectués, par exemple:


    « L'an 1769, le 17 novembre, les 6 heures de relevé à la requête de Madame l'Abbesse de Juvigny, de Monsieur le Baron de Coussey et de Monsieur le Marquis de Nubécourt, tous les trois propriétaires de la banalité du moulin de Bezonvaux, Beaumont et Douaumont demeurant ordinairement en leur maison abbatiale et château de Juvigny, Coussey et Nubécourt par lesquels domicile est élu au greffe de la prévôté dudit Bezonvaux, je soussigné Etienne Thirion demeurant à Charny, Garde préposé pour la conservation de la banalité du moulin dudit Bezonvaux pour Bezonvaux, Beaumont et Douaumont... »


    Vers la fin du XVIII siècle, le moulin n'est pas en bon état ; son bâtiment menace ruine et le bief ne retient presque pas l'eau. L'été, il arrive que son bas niveau empêche la roue de tourner ; l'hiver, quand il fait très froid, la même raison produit les mêmes effets l'insuffisance d'eau et de courant n'empêche pas le ruisseau de geler et la machinerie ne peut pas fonctionner. Une étude effectuée en 1794 fournit les renseignements complémentaires suivants:


    « Il y a dans cette commune 1 moulin a eau appartenant à la nation dont le citoyen Jacques Jacquot en est le fermier actuel ... il fait ordinairement de la belle farine, en rend ordinairement quatre vingt dix huit livres par quintal non blutée. Ledit moulin ne peut moudre qu'un demi quintal par jour lorsque les eaux sont basses à raison que ce ne sont que ceux de la fontaine qui le font tourner ... et quand les eaux sont abondantes, il peut en moudre dix quintaux par jour ».


    Jusqu'en 1914, l'usage dans les familles rurales étant d'utiliser la farine produite localement, l'installation fonctionne pour les besoins de Bezonvaux et des environs.


  • En 1914, la ferme de Méraucourt ou Muraucourt est un ensemble de bâtiments situé à 700 mètres au sud-est de Bezonvaux, en bordure de la route se dirigeant du village vers Vaux et Damloup. Sept habitants y ont été recensés en 1904.
    La ferme est située sur l'emplacement d'un castrum 52 dépendant d'Ornes. Il semble que Méraucourt soit, au Moyen Age, une petite agglomération comprenant un château féodal, quelques maisons, une église et un cimetière. Il est possible que la localité ait disparu pendant la Guerre de Trente Ans. Au début du XVllle siècle, il ne reste qu'une grande ferme construite en carré, propriété des familles Buvignier et plus tard Sponville.
    Il convient de noter que cet endroit est le lieu de naissance d'un personnage jouissant d'une certaine célébrité en Italie au XVIh siècle : Nicolas Arnou dit Nicolas Arnou de Verdun (Nicolaus Arnou Virdunensis). Né à Méraucourt le 11 septembre 1629, orphelin, il est recueilli par un prêtre qui décèle en lui de grandes capacités intellectuelles et lui donne une solide instruction. Envoyé terminer ses études à Rome, il y devient le recteur du Collège de la Minerve. Après avoir publié des ouvrages de philosophie qui lui confère une grande renommée, il est nommé professeur à l'université de Padoue où il enseigne cette discipline et la théologie. Il meurt le 8 août 1692 à Bologne.

     

     

     Les principales constructions de Bezonvaux jusqu'au debut du XX siècle

    Portrait de Nicolas Arnou


  • A 750 mètres au sud du village, sur la hauteur entre le Fond du Loup et le ravin du Pré-Sud, est construit de 1889 à 1891 un petit ouvrage d'intervalle. Les travaux débutent réellement après l'achat en 1890 du terrain (5 ha 053 ares) à Jean Louis Jobert habitant à Verdun. Terrassiers et maçons prennent pension dans les agglomérations voisines, notamment à Bezonvaux.
    L'ouvrage fait partie de la série de ceux implantés à partir de 1887. Il est à peu près semblable à ceux de Châtillon, du Manesel, de Sivry-la-Perche, etc. Il a un jumeau : l'ouvrage d'Hardaumont. Il constitue, avec ceux de Josémont, de Lorient et du Muguet lesquels ne sont que terrassés entourant celui d'Hardaumont, un important centre de résistance en bordure de la croupe venant de Douaumont. Il s'inscrit donc dans une organisation améliorée en permanence jusqu'en 1914, ce qui a d'autres conséquences pour la commune. En 1890, Jean Louis Nivromont est exproprié d'une parcelle dans le cadre du projet visant à construire une route d'accès à l'ouvrage d'Hardaumont (qui est sur le territoire de Douaumont). Ensuite, en 1893, 1902, 1910, 1912 et 1913, différents terrains d'une surface allant de 3 à 57 hectares font l'objet d'une expropriation en vue de réaliser les déboisements nécessaires au dégagement de vues et de secteurs de tir entre le fort de Douaumont et l'ouvrage de Bezonvaux ainsi qu'à proximité de celui d'Hardaumont. Les terrains expropriés au détriment de la commune de Bezonvaux et de quelques propriétaires (Nicolas Gabriel, Charles Marchai, Jean Louis Nivromont, etc.) sont situés sur les lieux-dits Hardaumont (sur le territoire de Bezonvaux), La Quoiraille, bois d'Hassoule et La Vauche.
    Edifié pour servir de sonnette en avant de la ligne principale de défense, l'ouvrage de Bezonvaux est prévu en 1914 pour 1 officier et 65 sous-officiers et soldats (c'est-à-dire une section). Ouvrage d'infanterie à profil triangulaire, il est constitué pour l'essentiel d'une cour entourée d'un remblai gazonné ayant un développement de 140 mètres. Ce remblai offre une pente inférieure à 45° vers l'extérieur et, du côté intérieur, il est modelé en banquette de tir. Celle-ci transforme le périmètre de l'ouvrage en position de combat où les défenseurs debout, couchés ou agenouillés peuvent prendre place pour utiliser leurs armes à feu. Ultérieurement, après la dotation de l'infanterie française en mitrailleuses, aucune position spéciale n'est aménagée. Au cas où de telles armes viendraient renforcer la défense, elles seraient mises en batterie sur le parapet de la banquette de tir. Le remblai est d'ailleurs suffisamment haut pour assurer la protection d'hommes se tenant debout dans la cour, contre les vues de l'extérieur et les tirs rasants. Dans la cour sont implantés deux abris en superstructures. Chacun d'eux correspond à une salle sans ouverture autre qu'une porte. Ce local, large de 5 mètres, profond de 12 et haut de 3,5 se compose d'une voûte en béton, épaisse de quelques dizaines de centimètres et recouverte d'une couche de terre. La capacité de chaque abri est de 44 hommes couchés et 144 assis. Au nord-ouest de la cour existe un petit magasin en béton mesurant 2,5 x 2,5 mètres, partiellement enterré (sans doute une soûte à munitions). L'ouvrage ne comporte aucune installation telle que casemate, galerie souterraine, observatoire, etc. Il est entouré d'un réseau de fils de fer barbelés large de 20 mètres, dont les piquets sont enfoncés dans des dés en béton. Le réseau est placé dans une cavité ayant la hauteur des piquets, dont le fond est en pente légèrement montante, dirigée vers l'ouvrage. L'accès à la cour se fait de plein pied en traversant le remblai par un passage à bords francs, constitués par des murs en aile maçonnée. Sur ceux-ci s'appuie une grille ouvrante composée de barreaux sur laquelle est rapportée une plaque d'acier trouée de meurtrières. Au-delà de la porte, dans le mur de gauche, est creusé un renfoncement permettant à une sentinelle de s'abriter.
     

    Les principales constructions de Bezonvaux jusqu'au debut du XX siècle

    L'ouvrage d'intervalle de Bezonvaux : plan de masse initial